La Phénologie

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Les phases et les stades à observer

La phénologie (dont l’origine étymologique est phénoménologie) désigne, au sens large, l’ensemble des particularités morphologiques du cycle de développement d’un être vivant, avec mention des époques de l’année correspondantes. Pour les végétaux, c’est l’étude des relations entre les phénomènes climatiques et les caractères morphologiques externes de leur développement. Par développement, on entend toute modification qualitative dans la forme de la plante. Le champ d'étude de la phénologie consiste donc à enregistrer, dans le temps, le retour des étapes de croissance et de développement des plantes et à étudier les facteurs qui l'influencent.
 
C’est à Karl Von Linné, qui fonda en 1750 un réseau d'observations phénologiques en Suède, que l’on doit le départ d’une véritable science de la phénologie destinée à étudier les modifications périodiques subies par les organismes vivants au cours des saisons. Le terme phénologie a été proposé par le botaniste belge Charles Morren en 1853.
 
Les modifications dans la forme des plantes sont jalonnées par des repères phénologiques ou phases de développement. Pour les plantes, les phases les plus observées sont :

  • la mise en place des feuilles ou aiguilles : débourrement ou feuillaison (foliation) au printemps
  • le développement des fleurs : floraison
  • le développement des fruit : fructification
  • la coloration automnale des feuilles : jaunissement, sénescence, chute des feuilles

Pour chacune de ces phases de développement, on distingue plusieurs stades phénologiques. Afin de pouvoir comparer des observations provenant d'espèces ou de régions différentes, la définition de ces stades est une étape essentielle. Les échelles de notation sont multiples. Pour le débourrement des arbres, on peut citer celle utilisée pour les espèces forestières dans le cadre du réseau national de suivi à long terme des écosystèmes forestiers (RENECOFOR). Cette échelle définie un nombre différents de stade par essence. Par exemple, pour les chênes, l'échelle comporte 6 stades :

  • b1 : bourgeon dormant (stade hivernal)
  • b2 :bourgeon allongé, écaille non soulevée
  • b3 : bourgeon tendre, début de décollement des écailles
  • b4 : ouverture des écailles
  • b5 : bourgeon épanoui ; le vert des jeunes feuilles est visible
  • b6 : les feuilles jeunes sont visibles et souvent étalées

Les photos ci-dessous illustrent quelques stades phénologiques du débourrement d'espèces arborées forestières (photos F. Lebourgeois). Les PDF des descriptions des phases sont disponibles ci-dessous ainsi qu la notice de description des observations faites dans les peuplements du réseau depuis 1997.

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Stades pour les feuillus

 

(scale for broadleaved trees)

Stade pour les résineux

 

(scale for conifers)

Manuel de référence pour les observatoires dans RENECOFOR

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(RENECOFOR Reference Manual)

Manuel de référence pour l'échelle BBCH

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(BBCH Refrence Manual)

Au niveau international, c'est l'échelle BBCH qui est beaucoup utilisée. Le sigle BBCH est l’abréviation pour Biologische Bundesanstalt, Bundessortenamt et CHemische Industrie. L’échelle BBCH améliorée a été développée conjointement par la Biologische Bundesanstalt für Land- und Forstwirtschaft (BBA), par le Bundessortenamt (BSA), par le Industrieverband Agrar (IVA) et par l’institut de culture maraîchère et floriculture (IGZ). Cette échelle décimale sert à la codification des stades phénologiques des mono- et dicotylédones. Elle est divisée en stades de développement principaux et secondaires en se basant sur l’échelle de Zadoks et al. (1974) pour les céréales. Il était plus simple en effet; de baser l’échelle BBCH sur le code Zadoks, bien connu et largement utilisé.

Les principes fondamentaux de l’échelle BBCH

  • L’échelle générale est la base pour toutes les espèces. Les échelles individuelles sont élaborées à partir de celle-ci. L’échelle générale peut ainsi être appliquée aux espèces pour lesquelles il n’existe pas d’échelle individuelle ;
  • Pour toutes les espèces on utilisera le même code pour un stade phénologique donné ;
  • Une description détaillée définit chaque code. Pour les stades importants, elle peut être complétée par un dessin ;
  • Des critères morphologiques faciles à reconnaître sont utilisés pour la description des différents stades phénologiques ;
  • Seul le développement de la tige principale est pris en considération ;
  • L’évaluation se fait à partir de quelques plantes individuelles représentatives de l’ensemble des plantes ;
  • Dans l’échelle générale, les longueurs sont préférentiellement exprimées en valeurs relatives par rapport aux longueurs définitives spécifiques aux différentes espèces ;
  • Les stades secondaires vont de 0 à 8 et correspondent soit à des chiffres soit à des pourcentages. Par exemple 3 feuilles, 3 pousses secondaires, 3 nœuds, 30% de la taille finale spécifique pour l’espèce ou 30% de fleurs ouvertes indiquent tous le même stade secondaire 3 ;
  • On utilise le code «99» pour caractériser le produit d’une récolte et pour les traitements après récolte ;
  • Lorsque ces mêmes produits deviennent des semences on utilise le code «00».

Un processus sous déterminisme climatique

Dans le cadre de la problématique des effets du réchauffement climatique sur le comportement des plantes, la phénologie est devenue, depuis ces dernières années, une voie de recherche majeure dans la communauté scientifique internationale. Ainsi, la phénologie permet : 

  • de retracer l'histoire du climat passé grâce à des modèles phénologiques fondés sur les processus ;
  • d'affiner les modèles de flux de carbone dans les écosystèmes terrestres. En effet, les dates du débourrement et de sénescence affecte la période d'activité photosynthétique des espèces à feuilles caduques ce qui régule les flux d'eau et de carbone échangés avec l'atmosphère ;
  • d'affiner les modèles de croissance, de survie... des peuplements forestiers et des productions agricoles ;
  • de mieux comprendre la répartition géographique des biomes à travers le globe.
  •  etc.
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Lebourgeois et al. 2006, Rendez-Vous-Techniques, n°13, 19-22

Les processus qui déterminent la mise en place de feuilles, des fleurs, etc. sont essentiellement sous la dépendance des températures. Pour comprendre leurs actions, il est essentiel de bien préciser la notion de dormance. A l'heure actuelle, il existe une certaine divergence des points de vue quant à sa définition. Une des définitions considère que la dormance peut être considérée comme l'arrêt temporaire de croissance visible de toute structure de la plante contenant un méristème (Lang, 1987). A partir de cette définition, on peut distinguer trois types de dormance (Vitasse, 2009) :

  1. La paradormance, qui correspond à une inhibition de croissance provoquée par un autre organe de la plante, distinct et éloigné du tissu dormant (exemple : inhibition des bourgeons axillaires par le méristème apical) ;
  2. L'endodormance (dormance au sens strict, "rest") qui est une inhibition de croissance liée à des facteurs endogènes au tissu dormant. Pendant ce stade, la croissance est impossible même si les conditions extérieures sont favorables. Généralement, la levée de l'endodormance nécessite une accumulation suffisante de températures froides (Chilling Units, Chilling requitements, Chilling temperatures, etc.) ;
  3. L'écodormance ou quiescence est une inhibition imposée par les contraintes du milieu. A ce stade, la croissance est possible mais il faut pour cela des conditions favorables ; notamment des températures suffisamment élevées pour permettre le développement ontogénique (=morphologique) des bourgeons (accumulation de températures chaudes ou "forcing Units", "forcing temperatures".

Les Figures ci-dessous extraites de la récente thèse de Yann Vitasse (2009) résument le cycle saisonnier des arbres caducifoliés en climat tempéré et les différents types de modèles mécanistes utilisés pour la modélisation de la phénologie.

Vitasse Y., 2009. (10.6 MB) Déterminisme environnemental et génétique de la phénologie des arbres en climat tempéré. Suivi des dates de débourrement et de sénescence le long d'un gradient altitudinal et en tests de provenances. Université Bordeaux I, N° ordre 3788, 410 pages.

Differt J., 2001. (1.73 MB) Phénologie des espèces arborées. Synthèse bibliographique. Analyse des données du réseau Renecofor. Rapport Scientifique, UMR Lerfob INRA-ENGREF 1092, Equipe Ecologie Forestière, 224 pages.

Cycle-saisonnier.jpg
Modele-temps-phenologie.jpg

Quelques données sur les arbres des forêts françaises : le cas du réseau RENECOFOR

L'analyse des observations phénologiques faites depuis 1997 sur les peuplements forestiers adultes du réseau National de suivi à long terme des écosystèmes forestiers (RENECOFOR) a permis d'apporter des élements de réponse quant à la variabilité spatiale et temporelle et inter-spécifique du débourrement, du jaunissement et de la longueur de saison de végétation des 10 principales essences forestières françaises. Cette page présente quelques résultats obtenus dans ce réseau (voir la page publications pour obtenir les articles scientifiques et techniques déjà publiés).

Variabilité interspécifique de la date moyenne de débourrement, de jaunissement et de la longueur de la saison de végétation pour les peuplements forestiers du réseau Renecofor. 10 espèces, 102 peuplements, plus de 3000 arbres.

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Effets des facteurs climatiques et stationnels sur la date moyenne de débourrement, de jaunissement et sur la longueur de la saison de végétation pour les peuplements forestiers du réseau Renecofor. 10 espèces, 102 peuplements, plus de 3000 arbres.

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Relation-avec-conditions-thermiques.png
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